Au cœur d'un paysage

De fil(m) en aiguilles

Aussi immobile que puisse paraître un paysage (ainsi défini “vue d'ensemble que l'on a d'un point donné” selon le Larousse), le paysage (dans son autre définition “étendue spatiale, naturelle ou transformée par l'homme, qui présente une certaine identité visuelle ou fonctionnelle” selon le Larousse) est en constante évolution. Le moteur de mon projet photographique a été de comprendre et d’illustrer ce qui fait évoluer le paysage. Les transformations du paysage  peuvent être éphémères comme les douces lumières présentes de l’aurore à l’aube, et du coucher du soleil au crépuscule. Le mouvement perpétuel des saisons fait revivre les fleurs au printemps et flamboyer la nature en automne, quand l’activité humaine génère des conséquences dramatiques à l’origine du dérèglement climatique.

Cette quête des transformations d’un paysage et des points de vue a commencé après être tombé amoureux des Aiguilles d'Arves grâce à deux photos: la photo “Foncouverte / Les Aiguilles d’Arves”, prise par Bernard Grange retrouvée dans une vieille maison de famille et une autre de Xavier Jamonet, “L’or des Alpes”, appréciée au détour d’un magazine. De fil en aiguille, j'ai cherché à découvrir quels étaient ces sommets effilés si graphiques qui pouvaient servir de décor à l’action des astres, des saisons et des hommes. J'ai trouvé. J'ai alors passé de nombreuses heures à essayer d’immortaliser ce qui pouvait sublimer ce paysage: la nature faisant évoluer la scène, du cosmos au vivant, de la lumière aux éléments. Les lueurs et les saisons habillent alors ces décors. Du haut de leurs 3358, 3513 et 3514m,  les aiguilles d'Arves observent passivement la modification des paysages naturels par l’Homme.


Les impacts des activités humaines sur la montagne et ses paysages sont importants. On peut distinguer les actions directes (l'agriculture, l'élevage, les transports, l'agrandissement des stations, l'éclairage des villes, les activités de loisirs comme le ski ou la randonnée) et les actions indirectes via le dérèglement climatique (manque de neige, retrait glaciaire, éboulement, dégel permafrost, remontée de la végétation). Malgré leur aspect immuable, les Aiguilles assistent depuis leurs sommets à l'action de l'Homme sur les paysages, qui dérègle l’équilibre climatique et la biodiversité. Selon le WWF France:  « L’exotique est tout autour de nous pour peu que nous laissions au sauvage la place qu’il a toujours occupé. Plus encore dans les Alpes qu’ailleurs, il est essentiel de penser ce milieu dans sa globalité: un territoire transfrontalier, d’où l’eau part pour abreuver tout le continent, où les animaux et les plantes doivent pouvoir circuler librement. Le tourisme alpin nous permet de profiter de ce trésor européen. A nous aujourd’hui repenser notre façon d’y venir, notre manière de le concevoir. Aujourd’hui plus que jamais les montagnes des Alpes ont besoin qu’on les protège. ». Puisse ce regard sur les Aiguilles d’Arves éveiller votre envie de protéger les paysages de montagne, hâvre de fraîcheur face au coup de chaud inéluctable...